Top Télé Maximum est la première collaboration de Pierre La Police et Cornélius et remonte à… 1993… Misère, le temps passe tellement vite… En même temps, je m’en fous, je n’étais même pas né, hahaha ! Malgé cela, en parce que j’ai accès aux archives de mon frère Raoul, je peux retracer l’évolution de ce livre de l’ère primitive à nos jours et je vais tenter de montrer à nos plus fidèles lecteurs pourquoi ils doivent impérativement acheter une nouvelle fois ce titre emblématique de « l’humour idiot ».
Comme son titre l’indique, Top Télé Maximum s’intéresse à cet univers qui s’est substitué en grande partie à nos sens pour appréhender notre espace contemporain. Il fallait tout le talent et toute l’obstination de Pierre La Police pour parvenir à lever le voile sur le monde fascinant qui se cache derrière le petit écran, et c’est d’une main gantée de fer que notre observateur de choc a mené cette opération salutaire. Ne reculant devant aucune méthode pour mieux informer ses lecteurs sur les méandres occultes du 8éme Art, Pierre La Police a mis à contribution son carnet d’adresses et ses archives personnelles pour dénicher les gros dossiers qui ont échappé aux autres. Les révélations pleuvent comme les beignes dans une manifestation d’agriculteurs, et aucune icône ni aucune vedette n’est épargnée par cette déferlante de vérités ahurissantes.
Pourtant, ce livre n’était à l’origine qu’un modeste opuscule de 48 pages reprenant des chroniques parues dans Les inrockuptibles première formule et dans les pages du défunt quotidien Le jour. Il mesurait 9 x 14,5 cm, était imprimé en photocopie sous une couverture sérigraphiée en 3 passages couleur. L’intérieur était tiré dans les marges des comixs de J.C Menu, Lewis Trondheim et David B. La collection Delphine était elle aussi calée dans les chutes de papier de ces titres, et Francis le blaireau farceur de Claire et Jake et Le dormeur de Lewis Trondheim virent le jour dans ce contexte.
On a du mal à se représenter l’extrême précarité dans laquelle ces fascicules étaient produits. Tirés par tranches de 100 à 200 exemplaires, ils étaient découpés, assemblés et reliés manuellement, dans un appartement encombré et relativement merdique. Des variations apparaissaient d’un tirage à l’autre, le tout premier d’entre eux ayant bénéficié d’une brouette sérigraphiée reproduite mécaniquement dès la deuxième fournée. Les tirages étaient décidés en fonction des sommes présentes sur le compte bancaire de Cornélius et, malheureusement, ce mode de production voyait sa souplesse compensée par un coût très élevé. Ainsi, la première édition de Top Télé Maximum était-elle vendue cher (38 francs) et rapportait peu. On la trouvait dans quelques boutiques et elle était achetée par des amis et des connaissances qui, vivant eux-mêmes dans l’indigence, ne manquaient jamais de pester contre son prix prohibitif. Quelle merveilleuse époque…
Comme le répète souvent mon père, « La vache enragée rend plus solide et forge le goût pour d’autres nourritures ». C’est ainsi que la deuxième édition de Top Télé Maximum (dite « ultime ») vit le jour en 1996, imprimée en offset mais refusant encore de se soumettre aux principes de production conventionnels (voir à ce sujet le billet consacré à Nos meilleurs amis et l’Acte interdit). Pas moins chère, à peine plus rentable, elle voulait donner plus à ceux qui avait trouvé le programme un peu court. L’ajout de chroniques tirées du magazine Rock’n folk et quelques illustrations étaient venues épaissir cette version de 64 pages, inaugurant la nouvelle formule de la collection Raoul, dos carré et format agrandi.
Quatre ans plus tard, des aplats orange venaient dynamiser un sommaire à peu près identique, la couverture gagnant quelques couleurs en passant à l’offset.
Et nous voilà en 2011. Le monde a changé, Top Télé Maximum est épuisé depuis plus de 5 ans, Raoul m’a transmis son catalogue… Avec Pierre La Police, nous comprenons qu’il est temps de rendre à nouveau accessible ce bréviaire pour que les nouvelles générations s’en emparent. Le livre est disloqué, dépecé, repensé de fond en comble, bousculé sans ménagement. La moitié des pages filent à la poubelle; la pagination est augmentée, le livre passe de 64 à 96 pages. C’est donc près de 70 % de matériel inédit qui est proposé ici ! Une nouvelle bichromie chasse le noir et l’orange pour un assemblage plus complexe de violet et de jaune d’or. Les doubles pages panoramiques viennent rythmer les révélations d’aujourd’hui et d’hier, le livre est plus que jamais indémodable.
96 pages, format 14,5 x 16,5 cm sous couverture à rabat imprimée recto/verso pour un prix de 14 euros… Top Télé Maximum n’aura jamais été aussi beau, aussi bon marché et, espérons-le, aussi rentable.