Ça fait un moment que j’entends : « ta collection, Delphine, c’est pour les enfants, nan? Francis, Faits divers… ». Alors, je vous le dis tout net: je suis peut-être jeune, j’aime bien rigoler, mettre des roustes à Raoul de temps en temps, mais je suis pas une gamine! J’aime aussi la poésie, OK?
Il y a quelques années Louise avait publié Bottin mondain et L’objet invisible, c’était elle la puriste. Mais ce mois-ci, Philippe Petit-Roulet sort Spots dans la collection Delphine. Parce qu’il faut un peu de place pour que la magie opère…
Petit-Roulet, on le connaît depuis les années 80, notamment pour ses livres avec Didier Martiny: Macumba river, Bruce predator, Papa dindon, et tant d’autres chefs-d’oeuvre. C’est aussi LA campagne de pub pour la Twingo dans les années 90, souvenez-vous!
Troisième rencontre entre Philippe Petit-Roulet et les éditions Cornélius, Spots rassemble des dessins publiés dans le New Yorker, magazine pour lequel il commence à travailler en 1992, suivant les traces de son « maître absolu », Saul Steinberg. Avec ses histoires courtes et sans paroles, qui évoquent parfois James Thurber ou Chas Addams, Petit-Roulet nous emmène dans son univers décalé, absurde et tendre. Derrière la simplicité apparente, se cachent une grande finesse et une inquiétude certaine. Il y suffit d’un miroir, une ombre ou une porte pour révéler ce qui est caché. Son dessin exigeant, dans la lignée d’un Chaval, Bosc ou Sempé, est un miracle de dépouillement et d’équilibre. Funambule sur le fil du rasoir, en quête du trait le plus simple et le plus efficace, Petit-Roulet glisse entre le noir et le blanc, et apprivoise le vide. Rien d’étonnant à ce que cet artiste amoureux du Japon, éternel insatisfait, aime Hokusaï qui, au soir de sa vie, cherchait encore le dessin parfait.
Spots est le nouveau livre de la collection Delphine, il mesure 15 x 20 cm à l’italienne. Sa couverture est souple avec rabats. Il compte 128 pages imprimées en bichromie, bleu et rouge, et il est complètement bilingue. Il coûte 17,50 euros.