Notre copine Nicole est incroyable, elle n’arrête jamais! En attendant l’hiver et la sortie du tome 4 de Nicole (et Franky), elle a décidé de se chauffer les méninges et d’aller questionner Benoît Preteseille sur son dernier ouvrage Histoire de l’art macaque. Et hop! En deux temps trois mouvements, la voilà qui se retrouve à tirer les vers du nez de notre cher Angoumoisin. Quelle enquiquineuse! Accrochée à son micro comme à sa fausse carte de presse, elle nous livre une interview inédite pour Radio Cornélius, qui met en lumière les intentions de l’auteur, ses aspirations et ses choix graphiques. Des détails croustillants, que vous ne trouverez nulle part ailleurs! Sacrée Nicole, qu’est-ce-qu’elle ne ferait pas pour ses petits lecteurs chéris?
© Photo Alain François
Comment décrirais-tu ton dernier ouvrage Histoire de l’art macaque?
Je raconte l’histoire de l’Art, de la Préhistoire à nos jours, vue par des petits singes dans la jungle. Je donne des pistes sur les différentes visions de ce que peut être cette drôle de chose (« l’Art ») à travers le temps.
Qu’est-ce-qui te pousse à revenir si souvent sur ce sujet ?
Créer des objets d’art est une manie très humaine qui me pose question. Pourquoi décide-t-on de devenir artiste ? Avec quoi travaille-t-on ? Avec qui ? Qu’est-ce que ça signifie ? Ce sont des interrogations sans fin, qui ont plusieurs réponses, jamais aucune définitive. Je l’aborde de façon très différente selon mes livres. Que ce soit dans des biographies d’artistes-limites (Picabia, Victor dans Maudit Victor ou autres), dans des adaptations où j’essaie de cerner comment un autre créateur travaille, dans des pamphlets dessinés comme L’Art et le Sang (qui prend pour point de départ l’envie de Fantômas, génie du crime, de devenir le plus grand artiste de tous les temps pour raconter un jeu de massacre)… Dans mon avant-dernier livre, Mardi Gras, je tournais plutôt autour de la notion de Beauté, notamment corporelle.
Dans Histoire de l’art macaque le système narratif est différents de tes précédents ouvrages, chaque page fonctionnant comme une scène autonome. Tu as aussi opté pour un dessin au trait, renonçant aux bichromies qui caractérisaient ton travail jusque-là. Qu’est-ce-qui t’as amené à faire ces choix?
J’envisage chaque livre comme une œuvre autonome. Pour celui-ci, j’avais envie de condenser le propos (100 pages pour toute l’histoire de l’Art, c’est acrobatique…), ce qui m’a poussé à utiliser des cases. Et, ressentant ce projet comme plus narratif que les autres, je n’ai pas eu un besoin profond de ciseler chaque case en bichromie délicate. Mais bon, tous ces choix sont instinctifs.
Envisages-tu que ton nouveau livre puisse avoir une portée pédagogique ? Et n’est-ce pas ce que tu recherchais, au fond ?
Je voulais que quelqu’un qui n’y connaisse rien ne soit pas rebuté par une avalanche de références d’artistes. Et que des questions compliquées y soient traitées simplement, comme la place sociologique qu’un artiste a pu avoir dans l’histoire : est-il considéré à telle ou telle époque comme un chaman, un artisan, un courtisan, un créateur libre, etc. ? On voit trop souvent l’histoire de l’Art humain comme une suite de génies exceptionnels et intimidants se passant le relais, je préférais montrer que tout cela se fait aussi par nécessité, tâtonnements, erreurs. Si cela peut être une porte d’entrée décalée pour regarder des œuvres d’art, c’est parfait !
Comment distingues-tu les livres que tu donnes à Cornélius et ceux que tu édites toi-même chez ION, ta maison d’édition ?
Je ne me publie pas moi-même chez ION, ce sont des livres de dessinateurs dont j’admire le travail graphique, sans chercher la narration. Mes livres en tant qu’auteur, et notamment chez Cornélius, sont plus des bandes dessinées.
Quels sont les artistes qui stimulent le plus ta créativité?
Ceux qui cherchent et ne se reposent pas sur une formule, que ce soient des musiciens, des cinéastes ou des dessinateurs. Et je dois avouer un plaisir coupable à lire des vieilles cochonneries du XIXème siècle, des romans-feuilletons bancals, des contes un peu ratés. Il y a parfois une inventivité folle dans des livres de Gaston Leroux ou de Jean Lorrain qui me font réagir…
Merci Benoît, à la prochaine!